Et le mien, d’enfant hypersensible n’a que 3 ans ! Mais j’ai l’impression d’avoir déjà vécu l’Effondrement avec un grand E (celui qui pourrait advenir bientôt ??). Ou, comme certains diraient plusieurs Effondrements.
Si je décide d’en parler, à part pour vider mon sac bien sûr^^, c’est parce que j’aurais aimé lire un tel article. Parce que lorsqu’on se sent perdu, on a envie de s’accrocher un tout petit quelque chose qui nous dit que nous ne sommes pas seul, que ce qu’on vit est « normal », tout du moins partagé par d’autres, même s’ils ne sont que 2 par ailleurs :p
Alors dans cette première partie, je me plains de ma vie, et dans la 2ème qui va suivre, je vous proposerai les outils dont on s’est dotés pour gérer ça au mieux. C’est à dire pas idéalement et faire disparaitre tous nos soucis d’un coup de baguette magique, non. Mais de façon efficiente : faire le mieux avec ce qu’on a (en énergie notamment).
Petit bilan de notre situation
Je suis une maman (épuisée, et « au bout de sa vie », comme vous l’aurez deviné) d’un petit koala de 3 ans et 3 mois. Et oui, un seul ! Mais comment font toutes ces mamans de 4 enfants ?!.
On peut sans aucun doute là-dessus le qualifier d’hypersensible. Hypersensible, un gros mot au même titre que zèbre, HPI, TDAH ou que sais-je. Tout le monde en parle, c’est à la mode, on dirait que tous les gamins le sont, tellement qu’on en vient à se demander s’il s’agit bien d’une réalité. Mais oui, pour la prendre en pleine face tous les jours la réalité, je peux vous dire qu’elle est tangible !
Hypersensible, et comme beaucoup d’hypersensibles apparemment, probablement zèbre. Certains diraient « pas testé pas zèbré », je leur répondrais qu’on parle ici d’un mode de fonctionnement, une façon d’être au monde, et non de comparer qui a la plus grosse son score. Mais je ne préfère en effet pas étiqueter sans être sûre, donc on ne fait que supposer.
J’aurais du commencer, comme toute bonne maman, par préciser que j’aime mon Koala plus que tout au monde de l’univers, que je préfère m’arracher un bras sur place plutôt que de le voir souffrir ou même pleurer, et que oui, c’est moi qui ai choisi de vivre à son rythme, dans une parentalité « bienveillante », et de respecter son mode de fonctionnement. Certains (les mêmes ?) pourraient donc me rétorquer « tu l’as bien cherché ton burn out parental ». Et je leur ferais en ce cas, un gros doigt 😀
Car oui, Vis Ma Vie de maman d’un être hypersensible, et tu reverras ta copie, chanceux parent d’un enfant peut-être docile en tout cas sympa avec toi pour te laisser ton rythme de vie au détriment du sien. Car les seuls parents qui se sentent de juger, ce sont bien ceux qui n’ont pas été confronté à l’adversité et qui l’ont eu facile ! #elleestfacilemaisçamemetlesnerfs
Bref, recentrons-nous.
Nous prenons donc beaucoup de temps pour notre petit, le papa et moi, nous faisons preuve d’une patience insoupçonnée (non vraiment j’insiste) avec lui, nous avons complètement revisité notre vision de la parentalité / éducation / du monde depuis son arrivée, surtout parce qu’il ne nous en a pas laissé le choix. Nous sommes de meilleurs personnes depuis qu’il est entré dans notre vie, bla bla bla.
Dans les faits, même s’il est le centre de notre univers, il s’avère que nous avons subi la torture par manque de sommeil pendant 3 ans et qu’on a l’impression de se faire tataner la face tous les matins (et tout au long de la journée).
Notre couple a été mis à l’épreuve, notre santé a été mis à l’épreuve, notre santé mentale est atteinte et notre survie, toujours en cours.
Hypersensible : c’est quoi le quotidien ?
Alors voilà, je parle uniquement de notre expérience. Elle est spécifique à notre famille. J’imagine qu’il n’y a que des cas particuliers : particulier à l’enfant, aux parents, au contexte, à la culture, etc… Par contre, je trouve qu’est très bien expliqué ce qu’est l’hypersensibilité dans cet article. Et je pense qu’on peut généraliser ces aspects, même si la forme qu’ils vont prendre seront différents.
Je vous liste ici nos principales difficultés du quotidien, regroupées par « thème ».
Grosse grosse angoisse de la séparation
Et du coup, cela a des répercussions sur pleins de choses, genre fondamentales. Je savais qu’en devenant parent, je ne savais rien, qu’on serait chambouler, qu’on se sentirait démuni parfois. Je ne me serais par contre jamais douter qu’il faudra apprendre à mon fils… à dormir et faire caca.
Mon fils ne fait des nuits que depuis quoi, 6 mois, et ce, pas du tout régulièrement. Ce qu’il fait régulièrement par contre, c’est avoir besoin de nous 1h, parfois 2h pour s’endormir le soir, si possible tout contre lui. Pendant ce temps, après la lecture d’histoire, il scotche, le regard dans le vide, ou au contraire, nous raconte mille et unes choses, parfois super décousues, mais qui semblent avoir vraiment besoin de sortir. Il se réveille aussi régulièrement, par cauchemar, parce qu’il a le sommeil léger, parce qu’il a besoin de checker que nous sommes toujours là. Parfois une fois, parfois 3, 4 ou 5 fois. Il lutte à chaque fois pour la sieste de l’après-midi dont il a pourtant tant besoin. Il ne pourra pas s’endormir dans un lieu qui ne lui ai pas connu. Il ne pourra pas s’endormir avec des gens en qui il n’a pas entière confiance. Il dort dans notre chambre, son lit collé au notre. Il colle sa petite main sur nous parfois pour se rassurer. Il ne prend ni tétine, ni doudou. C’est nous le doudou. Pas de compromis !
Hyperstimulabilité imaginative ? On a tourné dans nos têtes, pendant des heures, des jours, des mois, ce qui pouvaient bien terroriser notre fils dans le sommeil. Le RGO de ses premiers mois qui, synonyme de souffrance en position allongée, l’aurait marqué à vie ? L’angoisse de la séparation qui fait qu’il ne veut pas se séparer de nous et de la vie au moment de s’endormir ? Récemment, je me demande s’il n’a pas une imagination qui déborde, au sens propre, surtout de pensées négatives… qui font peur. Je n’ai pas la réponse, je doute fort qu’on l’ait un jour. Le challenge est ici de l’accompagner tout ce qu’on peut… sans succomber. Ce n’est pas DU TOUT une sinécure…
Et pour ajouter du fun, un nouvel élément perturbateur s’est invité question sommeil ces 6 derniers mois… ce sont ses douleurs « aux fesses » parce qu’il refuse de faire caca. Tout simplement. C’est pas un problème de pot, de toilettes de grands ou de couche. Non. Il veut juste PAS faire caca. Et là, je suis à sec sur le web sur cette question. Plein de petits, notamment dans sa classe, refuse de faire caca… autrement que dans la couche. Mais ils fond quand même caca. Pardon, mais c’est trop facile ça ! Non, le notre il passe l’étape du dessus : pas de caca. Je passe les sombres heures de questionnements « faut qu’on l’emmène aux urgences là non? ». Mais non, la pédiatre nous a dit qu’on pouvait paniquer à partir de 2 semaines. Soulagement. Et pas de constipation, hein, non parce qu’au moins ça nous aurait donné une piste physiologique. Non, quand il fait ses selles, ça passe, sans douleur, sans saignement. Il se retient, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus retenir. Quand tout va bien, il ignore la situation (se voile la face ?) et laisse la nuit portait ses fruits : il fait caca dans son sommeil. Ça évite à tout le monde d’affronter la chose. On est content quand c’est ça, même si on dort avec une odeur de poney de fait. Quand ça va pas, c’est des journées où il est mal des conflits, des pleurs, des ratages de bons moments avec les autres, des nuits hachurées. Bref, l’enfer Version2. On pensait que le sommeil était dur, parfois sur le caca, on se demande si c’est pas pire à gérer.
Après avoir retourné le web, en avoir parlé à qui on pouvait (dont une psy qui nous a donné l’impression de faire une mort cérébrale quand on lui a exposé notre situation), on a fini par en déduire que notre petit Koala avait bien du mal… avec la séparation. Il vit dans une sorte d’angoisse permanente. Non pas que ça se voit au quotidien ou qu’il ait l’air stressé. On le décrit comme zen et calme en dehors de chez nous. Mais factuellement, depuis la maternité, il est comme ça. Il a besoin d’un fort contact, il a besoin d’être rassuré, il se ronge les ongles depuis ses 1an et demi. Il est hypersensible et c’est comme s’il sentait qu’il était trop fragile et vulnérable pour dormir sur ses deux oreilles. Il est tellement angoissé qu’il a envie de tout retenir… jusqu’à ses selles.
Nous n’avons trouvé aucune autre solution que notre entier soutien et notre bienveillance à notre petit bonhomme, quitte à nous mettre nous-même et nos besoins de côté parfois…. Cela ne dure qu’un temps ! A un moment, il arrêtera d’avoir besoin de nous. Mais si vous avez des pistes ou mieux, des solutions, on est preneur 😉
Il ne peut pas être seul… jamais
C’est un peu un corollaire à l’angoisse de la séparation qu’on subodore. Il a besoin de nous, viscéralement. Il a passé ses premiers mois en écharpe collé à moi ou à son père. Il faut toujours, même à 3 ans, être dans la même pièce que lui. Si possible avoir un contact physique. Il ne joue pas seul, ou très peu. C’est à dire pas tous les jours, et peut-être 10 min. Mais c’est rare. Dès qu’il est avec nous, il faudrait lui dédié 200 100% de notre attention. C’est le cas avec les grands parents aussi. Sauf quand il joue… avec d’autres enfants. Et encore, quand il s’entend mollement avec certains ou qu’il est pas d’humeur, il faudrait qu’on reprenne le jeu avec lui.
Il s’endort avec nous, il dort dans notre chambre. Même quand on fait la route, il faudrait être constamment à l’arrière avec lui (on le fait ponctuellement sur des grands trajets seulement). A mon avis, Koala aurait été bien heureux de ne pas aller chez la nounou et rester à la maison… ce qui aurait été possible s’il avait siesté, dormi la nuit et joué seul ! Or c’est un job à temps plein !
Pareil pour les activités, il faut qu’on fasse avec lui. On colorie à deux sur le même dessin, on court ensemble sur la place. Il ne peut pas être seul. Il ne le souhaite pas et nous le fait bien comprendre.
A côté de ça, il est lui aussi très présent à nous. Il est exclusif souvent : il joue avec Papy mais qu’avec Papy, personne d’autre. Et 10 minutes après, c’est avec Tonton et c’est tout ! « Non pas toi maman » si j’ai le malheur de m’approcher ! C’est le bon côté : petit Koala sait créer des relations fortes et uniques. C’est juste épuisant pour nous !
Des sens super exacerbés
Oui, comme les supers héros. Et comme les supers héros, il faut une période d’adaptation, et de souffrance, avant de maitriser ces pouvoirs et en faire des alliés.
C’est pareil avec Koala : il a des supers pouvoirs, qui pour le moment… lui pourrissent la vie. Bruits, odeurs, sensations : tout y passe. A côté de ça, il est super sensible à la musique, aux rythmes. Il adore ses vêtements en Mérinos qui lui offre le confort du mouvement et la régulation thermique.
Les bruits
On aurait pu aussi ajouté ça dans la partie problématique de sommeil. Koala est à l’affut de tout, d’autant plus quand tout est calme et que chaque bruit devient perceptible (au moins pour lui). Une sirène de police noyé dans le brouhaha de la ville, les voisins qui trainent une chaise sur leur plancher, On ne pouvait pas mixer la soupe ou passer l’aspirateur quand il était là (on lui a depuis acheté un casque anti-bruit à Noël dernier. ça et la maturité font qu’il gère bien mieux). La nuit, il avait peur des « voijins », tout simplement parce qu’ils faisaient du bruit chez eux (pas du tout dérangeant pour nous) et que comme il ne savait pas ce qu’il se passait, ça lui faisait peur. Au fur et à mesure, on essayait de lui expliquer « ah ce bruit, ce doit être une porte qui se ferme », ou « là, y a quelqu’un qui marche dans l’escalier ». Il a fallu qu’on tende l’oreille partout où on était pour comprendre ses questionnements ou ses peurs. Encore aujourd’hui, il ne sait pas gérer quand il y a trop de bruit. Notamment par ex…… dans une salle de classe ou dans une cours de récréation….
Les odeurs
Je pensais avoir le nez super développé, ce n’est rien comparé à mon fils ! Il peut sentir la crème à 10km à la ronde. Et comme il n’aime pas ça, vous le verrez de plus en plus dégouté au fur et à mesure que vous vous approchez de lui. Impossible même de prendre un morceau de saucisse de mon assiette et lui donné, si j’avais des pâtes à la crème à côté. C’est niet. Il passe son temps à changer de couverts et à en demander des nouveaux. A cause de l’odeur.
Les sensations
Une étiquette qui gratte un peu, un grain de sable dans la chaussette, une goutte d’eau sur le TShirt… hurlements assurés si on enlève pas la cause du problème dans la minute ! Il y a des matière qu’il n’apprécie pas trop, donc qu’il ne porte pas. S’il se plaint rarement du froid il ne SUPPORTE pas avoir chaud. Il enlève ses vêtements comme s’ils étaient incandescent. S’il avait besoin de contact permanent les premiers mois de sa vie, à 4 mois d’âge, c’était plus fort que lui : il ne supportait pas d’être confiné dans une écharpe ou un porte-bébé. résultat, on a du acheter une poussette (ce qui n’était pas prévu) car il a refusé le portage pendant 4 mois. Il a repris ensuite, mais en porte-bébé uniquement, lui laissant un peu plus de liberté de mouvement.
Une sensation soudaine (un truc qui pique, un coup de chaud) ou une impression d’être contenu / contraint physiquement et on a l’impression qu’il est au bout de sa vie. Et ça, ça n’a pas l’air de passer pour le moment…
Un trop plein d’énergie à canaliser
On dirait qu’il est sur pile. Pas en mode survolté, il saute de partout. Mais en mode « aspirateur d’énergie ». Si au début notre entourage ne nous croyait pas (« mais c’est un enfant ! C’est normal qu’il bouge » – blague), ils ont changé d’avis après une journée de garde. J’ai vu mes parents épuisés. Heureux, mais vidés. Et nous, on vit ça 365 jours par an 😀
Il a besoin de bouger, constamment. Comme si son corps était traversé par un courant constant. Quand il est au calme, il bouge ses doigts, ses jambes. Le soir, pareil. C’est comme un tic. Il faut toujours qu’un de ses membres bougent. Le reste du temps, il se meut complètement : monter les escaliers encore et encore, monter sur tout ce qui bouge, sauter, danser, sauter sur place. Il va et vient de sa chaise à table. Il ne pose par une seconde, littéralement, quand on fait un câlin la plupart du temps. Notre façon de le gérer : le sortir dehors au moins une fois par jour. En mode vital. Même si depuis quelque mois (la rentrée notamment), il n’a plus envie de sortir….
Et en plus de cette énergie dont il déborde, il pompe celle des autres ! Il demande une attention constante, une attention attentive, présente. Il faut être toujours attentif à ce qu’il se passe, anticiper toutes les situations, recalculer les probabilités constamment, et réajuster le tir en fonction des circonstances. Anticiper est devenu une seconde nature, aussi bien sur le matériel (un sac avec tout ce qui pourrait être utile) que sur les évènements. On a toujours un plan A, B et C. Pas d’anticipation = des crises = un mauvais moment. A quoi bon sortir alors. Donc pour que ça se passe bien. On réfléchit en amont et on reste en veille durant tout le temps de la sortie, de l’activité, ….
En parlant d’activité, notre koala a la capacité d’attention d’une huitre. Dans le meilleur des cas, 10 minutes. Le temps que je prépare par exemple la table, le matériel, qu’on peigne 3 coups de pinceaux, qu’il parte faire autre chose, que je range, lave, débarrasse. Souvent, je me demande si c’est « rentable » de faire telle ou telle activité. Je passe le double de temps à la logistique ! Son attention est tout à fait normal en revanche si on joue avec les personnages et les tracto-pelles. Ou si on fait de la trottinette / draisienne.
Perfectionnisme quand tu nous tiens
Une autre problématique de notre quotidien, c’est surement son perfectionnisme. Perfectionnisme dans le sens où tout devrait se passer comme dans sa tête, au millimètre près. Que ce soit des choses dont il a la maitrise (monter sur un truc, mettre un cube dans un trou, mettre son Tshirt) ou qui sont tout à fait hors de son champ d’action (notre façon de jouer avec ces personnages, la façon dont tombe le ballon quand on le lance, la météo ou l’heure de la journée).
Comment ça se traduit ? Par des pleurs, une grosse grosse frustration et parfois une bonne crise de colère.
Le plus drôle, c’est que c’est tellement exacerbé chez lui, que ça peut apparaitre non pas au moment où il n’arrive pas à faire un truc, mais au moment où il le commence. Ex. pour être plus compréhensive : il décide de mettre son pantalon tout seul. Il s’assoie, prend son pantalon dans ses mains et crise. Il n’a même pas commencé à essayer de l’enfiler sur ses jambes qu’il est insatisfait. En fait, au moment où il a pensé, dans sa tête, qu’il mettait son pantalon, sont pantalon aurait du se matérialiser directement sur ses jambes. En fait, notre koala se sent frustré de vivre dans un monde qui n’est pas commandé par la pensée. Il ne devrait avoir besoin que de penser à un truc pour que ça arrive. Sinon, ça prend trop de temps, d’énergie, d’échec pour apprendre, et…
Il adore les jeux avec des personnages, imaginaires (à un moment, il parlait à ma main, littéralement) ou des objets humanisés (une voiture). Mais c’est lui qui fait les dialogues. Toi tu dis « bonjour camion pompier ». Si j’ai le malheur de dérouler un autre scénario, dans le meilleur des cas il me répète la réplique indéfiniment jusqu’à ce que je la dise. Dans le pire des cas, il entre en crise.
Au quotidien, ça implique qu’il ne raffole pas de faire ce qu’il ne sait pas faire. Impossible de lui donner une consigne et de lui montrer comment faire, et inutile d’attendre qu’il fasse un truc. Comme tous les enfants, bien sûr, y a des choses qu’il fait, qu’il teste et reteste. Mais sur plein de choses, quand il n’a pas décidé, on ne peut pas lui demander. Et il se met parfois dans des états pas possible, tout seul, quand il n’arrive pas à empiler un cube, fermer un placard, etc…
Car le perfectionnisme est déjà en soi compliqué à gérer, mais ça se corse parce que tout ce qu’il vit émotionnellement est en mode +++. Il sur-réagit, il n’y a pas d’autres mots, sur tout et tout le temps. Il ne peut pas se contenter de ne pas être content et de venir demander de l’aide. Ou de jeter son truc et de passer à autre chose. Il ne passe pas à autre chose, jamais. Il n’a pas le temps ! Il est rattrapé par une tempête émotionnelle qui l’embarque souvent trop loin pour qu’il puisse la gérer tout seul. En grandissant, il gère de mieux en mieux. Mais c’est un travail quotidien de lui apprendre à relativiser, passer à autre chose, accepter de. ne pas réussir du premier coup. C’est une boule d’émotions. Il est à fleur de peau. Et pour des parents fatigués, c’est d’autant plus dur de supporter continuellement des crises de larmes et de frustrations tout au long de la journée, sans répit.
Nos Effondrements
Je parlais en intro d’Effondrements, au pluriel. Car une des principales, voire la principale peut-être difficulté à vivre avec un enfant différent, peu importe la différence je crois, c’est l’effondrement de nos croyances. Sur tous les points. A tous les niveaux.
Encore une fois, nous ne sommes pas dupes. Nous avons fait un enfant après 30 ans, en connaissance de cause sur les bouleversements que ça allait amener dans et à notre vie. On savait qu’on allait changer de façon de vivre, de priorités. On savait qu’on allait être malmené sur quelques idées reçus que nous avions avant, en tant que non-parents.
Pour autant, je n’ai jamais envisagé que notre monde allait changer. Purement et simplement. Nous avons été ébranlé jusqu’aux fondations même de nos êtres. Toujours en bien, mais rarement sans douleur.
Au début, ces changements ont été des changements choisis. Enceinte, j’ai commencé à réfléchir ce que c’était d’être parent. Avoir la responsabilité d’un autre être humain. Mais cela m’a amené à des réflexion et des changements de paradigme dans la douceur, dans l’amour. On s’est mis à manger bio, je me suis documenté sur un la maternité (grossesse et accouchement) naturelle et respectueuse. Cela m’a amené naturellement au parentage proximal, la parentalité bienveillante. Portage, allaitement, motricité libre, communication non-violente. Et tout ça, j’y réfléchissais avant même la naissance !
Et puis Bébé Koala est arrivé. Et lui aussi nous a fait changer de paradigme. On avait plein la tête des modèles parentaux transmis par la société et nos familles :
- attention, pas d’enfant roi !
- donnez-le à garder, ce sont les parents qui doivent se reposer et prendre soin d’eux
- un enfant ça dort quand ça a sommeil
- allaitement mmouais mais pas plus de 3 mois (nos mères n’ont jamais allaité)
- cododo ? quoi mais vous êtes fous ?!
- les bébés font leur nuit autour des 3-4 mois
En j’en passe. On a tous l’image du bébé bien tranquille, qui dort toute la journée. Un enfant docile, qu’on laisse à garder sans crainte chez les grands-parents. On a vu tellement de 1er enfant chez nos potes qui n’ont quasi rien changé au quotidien de leur parent, littéralement. On a rêvé de mille projets ! Partir en camion en WE et en vacances, faire tout plein de choses, l’emmener partout, sortir chez les amis.
Dans notre réalité, notre enfant ne dort toujours pas « correctement » à 3 ans (il ne s’endort pas seul, à besoin de notre présence et peut se réveiller plusieurs fois par nuit). On a mis en stand by notre vie sociale : les soirées ressemblaient juste à l’un de nous deux, à partir de 20h / 21h, en train d’essayer d’endormir souvent dans l’échec pendant que l’autre fait sa soirée, épuisé. Les vacances sont encore plus fatigantes que le reste de l’année, car Koala a besoin d’un environnement connu et rassurant sous peine de se barrer en live. Nous sommes exténués, avec l’impression d’être syphonné de toute notre énergie, constamment. Je me demande encore comme on arrive à fonctionner, aussi bien physiquement qu’intellectuellement.
Et c’est là que toute nos théories s’effondrent.
- Le bébé / l’enfant n’est pas un objet qu’on façonne. Il ne respecte pas, tel un robot, des phases similaires aux mêmes moments que les autres. Comme les adultes que nous sommes, il y a autant de personnalités / besoins / comportements divers et variés chez les tout-petits, qui sont des personnes à part entière.
- Le rôle du parent n’est pas de contrôler, de se faire obéir. Il est d’accompagner son enfant dans son développement et son épanouissement. Alors oui, on va sacrifier peut-être des soirées, des sorties avec les potes, des vacances de rêves aux Maldives, on va peut-être mettre en stand-by la carrière, ne pas s’épargner la santé (sommeil, dos). Mais on a donné vie à des enfants, il faut donc assumer jusqu’au bout. Et on parle de quelques années à l’échelle d’une vie, c’est quoi 5% ?
- Non, il n’y a pas une Justice entre ce qu’on donne et ce que l’on reçoit. Nous sommes en train de donner plus d’énergie que d’autres parents (d’enfant un peu plus cool) pour faire éclore une nouvelle personnalité au monde. Si on fait le calcul, on en chie vachement plus pour le même résultat. C’est comme ça. On aura pas de médaille.
- Non, c’est pas parce que le plus grand nombre fait la même chose que c’est ce qu’il faut faire. D’ailleurs, relativisons le plus grand nombre. Cododo et allaitement à rallonge ne se font pas trop en France, en tout cas pas officiellement. Par contre, dans le monde entier c’est la norme, c’est eux le plus grand nombre. Et oui, à vue de nez, votre enfant fait partie de 5% (ou moins) à être hypersensible / zèbre, votre mesure étalon NE PEUT PAS être la norme
- Non, l’école, cette sacro-sainte institution qui fait partie de notre représentation profonde de la vie, n’est peut-être pas si fondamentale. Il existe d’autres alternatives mieux adaptées à nos enfants, à certains de nos enfants. Et encore une fois, ce n’est pas parce que tout le monde le fait que c’est la meilleure des solutions.
Voilà, je crois avoir fait le tour des principales idées reçues croyances. Et ceux qui savent sauront ce que cela représente pour arriver à cet état d’acceptation. Si faire évoluer mes idées et mes pratiques fait partie intégrante de mon processus, ce n’est pas le cas de mon conjoint. Et partir à l’aventure tous les deux sur cette route n’est, encore une fois, pas une sinécure. Mais un enfant, différent ou non, nous amène à nous interroger sur les aspects les plus essentiel de la vie.
Et si oui, j’ai écrit ce post parce que c’est très dur, qu’on a peu de personne à qui en parler car peu de monde connait ce genre de situation, je savoure pour autant chaque jour de ma vie, que je n’échangerais pour rien au monde. L’être humain se définit par ses contradictions mêmes 🙂
La suite : on arrête les lamentation et je vous explique ce qui nous sauve la vie au quotidien, avec zéro recette magique dedans –>
Source image : Concept art pour le jeu The Last of Us